Recrutement d'Eva Collin (PV Lewis-Eva)

Lewis regarda un instant l’entrée de l’immeuble, des plus banales. Un bref coup d’œil aux boîtes aux lettres lui indiqua le numéro de l’appartement. Il vérifia d’un geste machinal la présence de son arme, bien dissimulée dans un holster sous sa veste, et celle de son amulette anti-magie qui avait rejoint sa plaque militaire autour du cou. Il n’était pas prêt de l’admettre à qui que ce soit, mais les nécromanciens et autres médiums le mettaient toujours mal à l’aise. Il n’avait pourtant pas beaucoup de victimes sur la conscience, mais aucune envie que les quelques unes qui s’y promenaient reviennent le hanter, même si elles l’avaient toutes bien cherché.

Les effectifs étaient maigres ces temps-ci, et le lieutenant avait un peu perdu l’habitude de partir seul en mission, ne serait-ce que pour des raisons de protocoles. Mais ce n’était pas une raison pour reculer, ni même pour hésiter. Il tira d’un geste sec sur les pans de son costume, se demanda s’il n’aurait pas mieux fait d’opter pour son uniforme avant de se rappeler les raisons de son choix pour le civil, et sonna à la porte anonyme.

Lorsqu’on ouvrit, il du se retenir pour ne pas saluer, pestant intérieurement contre ces réflexes de soldat qui refaisaient surface lorsqu’il était nerveux. "Mademoiselle Collin ? Je suis Laurent Lewis, du Conseil des Watchers. Si vous avez un moment, j’aurais besoin de vous parler."

(Corinne)

Eva fit glisser les rideaux de velours rouge sombre et ouvrit la fenêtre pour aérer la pièce. Le parfum entêtant de Madame Rosado et les chamailleries avec son mari décédé lui avaient provoqué un léger mal de tête, l'air frais lui fit du bien. Le ciel était bleu, quelques nuages paresseux glissaient vers l'est.

Eva sourit, Madame Rosado était une vieille cliente, ses disputes avec son mari semblaient un numéro bien rodé. Aujourd'hui elle avait perdu la clé d'un meuble, une vitrine qui abritait sa collection de cloches et était persuadée que son mari l'avait cachée.

La sonnette de la porte interrompit sa rêverie. L'homme sur le seuil, grand et séduisant, lui était inconnu. Laurent Lewis ne ressemblait pas à sa clientèle habituelle.
Eva l'invita à entrer et à s'installer sur une des chaises.
"En quoi puis-je vous aider, Monsieur Lewis ?"

"Je vais aller droit au but, mademoiselle" fit-il en prenant place. "Votre réputation dans le domaine de la communication post-mortem n’est plus à faire. Nous avons besoin de vos services, et je suis là pour vos proposer un contrat de prestataire, au cas par cas. Je suppose que dans votre situation, vous avez entendu parler du Conseil des Watchers, des vampires, des démons ? Si ce n’est pas le cas, et bien... voilà."

Il eu un petit sourire qui se voulait rassurant. Ce n’était certes pas la manière la plus délicate d’aborder ces questions fondamentales, mais au moins l’équation était posée. Et s’ils voulaient de la finesse ils n’avaient qu’à envoyer un psy, pas un homme de terrain, aussi gradé soit-il. "Des questions, je suppose ? Vous n’avez pas à me donner une réponse ferme dans l’immédiat, bien entendu. "

(Corinne)

"Bien entendu..." Elle répéta les derniers mots de Lewis machinalement. Démons, vampires, cet homme était soit dérangé, soit trop lucide, dans les deux cas Eva se demanda comment elle allait s'en défaire, elle avait dépensé du temps et de l'énergie pour ne pas attirer l'attention sur ses capacités.

"Dis oui!" Cat était apparue à côté de Laurent Lewis, malicieusement elle souffla dans son cou. Eva vit l'homme réprimer un frisson, il était rare que Cat s'intéressa aux vivants ou qu'elle se manifesta à eux.

"Oui"
"Enfin je veux dire, c'est très inattendu, Monsieur Lewis, vous recrutez des médiums pour le conseil des Watchers. Bien sûr, je connais leur réputation mais la situation semblait redevenu calme. Qu'entendez-vous par contrat? avez-vous besoin de mes services maintenant ?"

Lewis pencha légèrement la tête, se demandant si elle le prenait vraiment au sérieux. Il n’avait pas l’habitude qu’on ne le prenne pas au sérieux, et ce n’était pas une impression qu’il appréciait. Il avait espéré qu’avec une medium comme elle, il pourrait se dispenser du speech habituel sur le thème de « oui les vampires existent », avec démo de magie à la clé et tout le toutim.

Ses pensées furent interrompues par la sensation – non, la certitude – d’une présence. Ses sens magiques étaient en éveil, bien que les morts ne fussent pas du tout sa spécialité. Mais quand il senti un souffle sur son cou, le doute n’était plus permis. Tentant vainement de contrer le frisson glacé qui lui remontait la colonne vertébrale, il ferma brièvement les yeux pour retrouver son calme. Il avait affronté des choses autrement plus horribles qu’un fantôme taquin, donc pas de raison de s’inquiéter... Enfin...

"Par contrat, je n’implique rien de trop contraignant, il s’agit essentiellement de clauses de confidentialité et de non-concurrence. Quand à la situation, et bien... disons qu’elle s’est compliquée, ces derniers temps. Vous l’avez sans doute perçu, les morts de Paris s’agitent. Une armée de zombies se prépare, rien moins. Nos rangs sont clairsemés, et nous manquons de spécialistes sur la question. C’est pourquoi nous faisons appel à des civils qualifiés tels que vous. Vous serez naturellement dédommagée à hauteur de vos efforts, que ce soit sous forme financière ou mystique. Intéressée ?"

(Corinne)

Lewis semblait de plus en plus mal à l'aise. Eva regarda autour d'elle, elle avait surchargée sa décoration à dessein, pas un espace libre, chaque étagère débordait soit de bougies de couleurs et de tailles diverses, soit d'objets variés (oeil de Ra, rubans, plantes et fleurs séchées, photos vieillies) : charlatan ou véritable médium, à chaque visiteur de se faire une opinion.

Elle reporta son attention sur l'homme en face d'elle, son regard s'était assombri. Cat avait posé ses mains sur ses épaules - les fantômes ressemblaient aux chats, moins on les aime, plus ils sont attirés - ses yeux étaient aussi noirs que ceux de Lewis et son sourire glacial. Cat suivait ses propres chemins, quelque soit la raison qu'elle avait d'accepter l'offre des Watchers, cela n'avait rien d'un geste altruiste.

La jeune femme ramena une mèche de ses cheveux blonds derrière son oreille, le geste était discret mais le message clair, Cat devait partir. Elle aurait aimé rassurer Lewis mais la présence de sa soeur était un secret qu'elle avait trop longtemps gardé pour qu'il lui échappe aussi rapidement.. Elle lui souria d'un air rassurant :
"Je serais ravie de collaborer avec les Watchers, Monsieur Lewis. Si vous avez besoin de communiquer avec un esprit ou si vous voulez que je vous avertisse d'un nombre inhabituel de décès..."

Un bruit sourd se fit entendre dans la pièce voisine.

Le lieutenant sursauta, portant par pur réflexe une main à sa veste, sans dégainer pour autant ni même laisser voir son arme, mais tout prêt à le faire, tandis que son autre main s’était soudain crispée, doigts relevés autour d’une boule invisible. Une lueur bleutée se concentra aussitôt au creux de sa paume. Malgré sa nervosité incontrôlable et qui ne faisait qu’ajouter à son agacement, il n’aurait pas si facilement fait étalage de magie si ce n’avait été une bonne occasion de prouver à Eva qu’il n’était pas démuni côté mystique. Voire, si besoin était, de lui montrer que la magie ne s’arrêtait pas à la communication avec les esprits. Si leurs dossiers spécifiaient qu’elle était une médium particulièrement douée, ils ne contenaient rien sur ses compétences au-delà de ce cadre.

Il se leva et ramena ses deux mains en position de repos, laissant le sort et la tension se dissiper. "Si vous avez quelqu’un ou... enfin, quelqu’un, je ne vais pas vous retenir. Voici ma carte, je vous invite à nous rendre visite au Conseil quand vous le souhaiterez. Sachant que le plus tôt sera le mieux, vos talents seraient réellement les bienvenus pour notre affaire en cours notamment."

(Corinne)

Eva prit la carte, essaya de contrôler les battements de son coeur. Mon dieu qu'il était nerveux, elle avait du mal à croire qu'il serait son contact chez les Watchers.
"Je viendrais sans doute demain, aujourd'hui je vais avoir du mal à annuler mes rendez-vous. A qui dois-je m'adresser ?"

"A moi. Et si je ne suis pas disponible, quelqu’un de mon équipe vous recevra, vous serez attendue." Il tendit sa main pour serrer la sienne, avant d’ajouter avec un sourire gêné "Vous m’excuserez auprès de la personne qui est avec nous, je ne voulais pas être impoli, et ma nervosité ne doit pas être prise pour de l’animosité."

(Corinne)

Eva sourit franchement, elle avait en face d'elle un homme qui côtoyait le surnaturel : aller chez un medium et y trouver un fantôme lui semblait naturel. C'était inhabituel et en fait plaisant.

"Je ne crois pas qu'il y ait - quelqu'un - dans ma cuisine." Comme pour lui donner raison, le petit chat tigré roux de sa voisine entra dans la pièce et sans un regard pour les deux bipèdes s'installa sur le sofa de velours brun.

"Mais je vous remercie pour la considération que vous avez pour mon monde, je serai ravie de travailler avec vous...Lieutenant Lewis, finit Eva en lisant la carte.

Les Watchers ont une hiérarchie militaire, tiens c'est nouveau pensa t-elle.