Une nuit agitée en perspective (Ouvert à tous)

L’agitation allait croissante au QG des Watchers ce soir-là. Patrouilleurs et militaires marchaient rapidement dans les couloirs, certains avaient les bras chargés d’armes ou d’équipement divers, ils croisaient de justesse leurs collègues chercheurs peinant sous le poids de livres et d‘anciens parchemins. Les slayers affûtaient leurs pieux avec une lueur bestiale dans le regard, de jeunes sorcières révisaient leurs sorts. Chacun regardait nerveusement sa montre et par les fenêtres, tandis que l’intercom général annonçait, à intervalle de plus en plus court, le compte à rebours avant la tombée de la nuit et donc l’ouverture des hostilités, et il ne restait guère de temps.

Dans les bureaux de chaque unité, les responsables organisaient leurs équipes. Sans être en alerte maximale, tout le personnel qui avait pu être mobilisé était présent, ce serait même la première sortie de terrain pour plusieurs jeunes recrues, il fallait bien commencer un jour – ou une nuit. Ce n’était pas une apocalypse – il n’y en avait pas eu depuis quelques temps d’ailleurs, alors qu’elles s’étaient succédées à un rythme quasi annuel durant la décennie précédente – mais simplement une conjonction d’éléments difficiles à gérer. La pleine lune, déjà, qui n’allait pas manquer d’exciter les loups-garous et zoothropes de tous poils, mais s’il n’y avait eu que cela, ça irait, on avait l’habitude. Mais ce soir coïncidait avec une fête rituelle chez les vampires, ce qui signifiait bien évidemment une demande accrue en sang, comme s’ils pouvaient penser à autre chose. Et cette prophétie sur le retour d’un prince-démon aussi, ou ce groupuscule sataniste dont les indics avaient prévenu qu’ils allaient passer à l’action pour voler un codex d’invocation. Rien d’insurmontable en soit, mais cela faisait tout de même un peu beaucoup pour ce qui restait une organisation underground, malgré le soutien imposé des militaires.

A la croisée de toute cette agitation, sans être directement décisionnaire mais consultée sur tout, Dana Morton avait un air sombre et buté, loin du calme professionnalisme qu’elle arborait dans ces cas-là. Tout le monde lui demandait des ressources et des hommes supplémentaires, mais elle ne pouvait quand même pas les inventer ! Enfin, si, il aurait été possible d’invoquer quelques mercenaires d’une autre dimension ou de réanimer quelques zombies pour se joindre à eux, mais ce n’était pas franchement dans les habitudes des Watchers.

- Okay ! s’écria-t-elle soudain en levant les mains. Taisez-vous, tous. Voilà ce qu’on va faire : en plus des équipes dédiées à chaque cas, je vais monter un groupe annexe. Nous allons patrouiller entre chacune de vos interventions, et nous serons prêts à intervenir en renfort de ceux qui en auront le plus besoin.
Sa voix un peu rauque et son net accent anglais malgré une syntaxe impeccable n’appelaient aucune contestation, mais ceux qui la connaissaient bien pouvaient y déceler une certaine lassitude, une fêlure qui ne lui ressemblait pas.
- Il nous faudrait un mix de compétences, pour répondre au mieux à toutes les urgences. Lucas, Philippe, vous venez avec moi. Qui d’autre ?

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Hors jeu

Voilà c’est parti ! Que les volontaires se portent, euh… volontaires pour cette équipe promise à une première mission mouvementée. N’oubliez pas que vous pouvez créer autant de personnages que vous le souhaitez, y compris des « red-shirts » destinés à y rester (dans ce cas, pas la peine de leur faire une fiche détaillée). Si votre ou vos personnages principaux n’ont rien à faire dans cette équipe de Watchers et militaires, pas de soucis non plus, vous pouvez en improviser un nouveau le temps de la mission ou à plus long terme, et on pourra pourquoi pas croiser vos vampires, lycanthropes et autres satanistes pendant la partie (rassurez-vous, ils ne seront pas éliminés sans votre consentement). On prépare les équipes et présentations au besoin ici, et l’action elle-même se fera dans la rubrique « Missions et aventures ».

Lucas, pour sa part, ne montrait aucune lassitude. Bien au contraire, il avait hâte de trouver quelque chose sur quoi taper, magiquement ou tout simplement physiquement. Se défouler faisait toujours du bien, et travailler avec Dana était un bonus non négligeable. L'agitation ambiante ne le touchait guère ; il était appuyé à un mur à côté de Dana, occupé à aiguiser un pieu de la façon la plus nonchalante qu'il soit.

C'était loin d'être toujours le cas, mais pour une fois il incarnait parfaitement l'image du flegme britannique.

Il jeta bien un coup d'oeil à Philippe quand Dana l'appela comme co-équipier. Cela voudrait dire parler français. Il détestait être obligé de parler français.

Emilie regarda autour d'elle, le major avait vraiment fait appel à n'importe qui. Elle jeta un regard rapide à son watcher qui semblait en grande discussion et ne prêtait pas attention à elle. L'occasion était trop belle de s'échapper quelques heures de son influence.

- Moi, . Emilie Bonvoisin, slayer, je suis partante pour patrouiller avec vous.

Elle s'était redressée et avait parlé avec une voix claire et forte. Blonde aux yeux bleus, elle ne dépassait pas 1,60 m et donnait l'impression de pouvoir être balayée d'un revers de main mais ses yeux clairs étaient durs et brillaient déjà de l'excitation de pouvoir en découdre.

Toute cette agitation ne lui disait rien qui vaille, et Owen pesta intérieurement contre l'ordre qui l'avait amené ici. Au début, le chaos ambiant avait quelque chose d'amusant, mais la nervosité qui perçait sous la carapace de certains des "pros" s'infiltrait un peu partout. Tout ça n'avait rien d'un exercice, quelque chose de sérieux se préparait.

Quelque chose de dangereux.
En fin de compte, cette mobilisation générale avait un certain avantage. Cette nuit, le QG serait probablement l'endroit le plus sûr de la ville. Il suffisait de réussir à y rester planqué et à ne pas mettre les pieds dehors. Il y aurait peut-être même moyen de profiter de l'inattention des autres pour mettre la main sur quelques grimoires aux noms prometteurs qu'il lorgnait avec avidité depuis deux semaines. Oui, il y avait moyen de rendre cette soirée très intéressante...

"Okay !" La voix de Dana imposa soudain le silence. Ecoutant le speech d'une oreille distraite, sirotant d'un air concentré sa tasse de thé pour donner le change, Owen entama une retraite discrète vers un coin peu exposé de la salle.
"... Lucas, Philippe, vous venez avec moi. Qui d’autre ?"
Il n'était malheureusement pas le seul à essayer de prendre la clé des champs, une gorgée de thé ayant elle aussi décidé de se planquer en bifurquant du mauvais côté, provoquant au passage une magnifique quinte de toux. Il y avait quelque chose de magistral dans le choix du moment, juste la ponctuation idéal à la fin du discours de Dana. Côté discrétion, par contre, on faisait mieux.
Adieu veau, vache, cochon, couvée. Grimoires et rituels occultes aussi. En redressant la tête, Owen avait l'horrible certitude que deux yeux verts étaient désormais braqués sur lui.

Dana parcourait la salle du regard, attentive à ceux qui se détournaient, ceux qui s’appliquaient à ne pas bouger de peur de se faire remarquer, ceux qui se dépêchaient de regagner leurs propres équipes pour éviter de se faire réquisitionner, ceux qui levaient la main mais qui ne collaient pas à ses plans, ceux dont elle ne connaissait ni le nom ni l’affectation… et les autres. Quand la nouvelle slayer s’avança d’un pas, Dana échangea un regard avec son watcher qui hocha discrètement la tête. Un peu de temps chacun de leur côté leur fera du bien, à l’un comme à l’autre, et une slayer était toujours un atout certain. Enfin, tant que ce n’était pas Catherine, mais heureusement celle-ci était déjà en mission ailleurs.

Puis elle posa les yeux sur une des plus récentes recrues des archives, comment s’appelait-il déjà ? Owen, oui, c’est ça. Elle n’avait pas eu l’occasion de le revoir depuis son arrivée, mais avait naturellement suivi son dossier, comme elle s’efforçait de faire pour tout le monde dans le service. Elle était curieuse de le voir à l’œuvre, et tenait à ce que chacun participe à tout, ne serait-ce que pour savoir en quoi le boulot des autres consistait. C’est pour cela qu’elle insistait parfois que les slayers fassent leurs propres recherches, que les watchers apprennent un minimum de magie… et qu’elle désigna le jeune homme ce soir là.

« Monsieur Leavenworth aussi, s’il vous plaît. Encore deux ou trois avec moi, les autres préparez-vous, on part dans cinq minutes.»

Lucas observa avec intérêt la Slayer qui se porta volontaire. Pas mal... Et c'était toujours bien d'avoir une Slayer en patrouille, même lorsqu'elle se prenait pour la reine du monde comme cette chère Catherine. Une quinte de toux à côté de lui, et il se tourna pour voir qui venait ainsi d'attirer l'attention sur lui.

Leavenworth, d'après Dana. Un compatriote ? Un compatriote qui ne semblait guère ravi d'avoir été désigné d'office, et Lucas ne put s'empêcher de sourire, amusé.

- Pas exactement le résultat que tu voulais ? demanda-t-il dans sa langue maternelle, qui avec un peu de chance serait aussi celle de l'autre.

Un peu surpris, Owen jeta un coup d'oeil au jeune homme à l'accent britannique si prononcé. Londres, peut-être? "Hell, no."

Il se demanda ce que Grand-Père penserait de tout ça. Est-ce que le vieux schnock était au courant de la situation? Avait-il pensé qu'en expédiant son cher petit-fils aux archives pour le contrôler il l'envoyait en fait dans la gueule du loup? Comme si la famille n'avait pas déjà assez souffert pour la cause...
O, Grand-Pêre, qu'as-tu donc fait?
Alors que la peur montait en lui, il sentit un souffle glacé sur nuque. Oh, gosh. Oh, gosh... Il lança un regard paniqué autour de lui, à la recherche d'un signe quelconque sur le visage de ses voisins, espérant que ce n'était qu'un effet de son imagination. Qu'il n'avait pas encore provoqué quelque chose.

Lucas ne retint pas un petit rire à la réponse de l'autre, mais ce rire tourna court lorsqu'il sentit un soudain courant magique passer non loin d'eux. Il ne pouvait le localiser précisément, encore moins définir sa nature, ses propres pouvoirs n'étant pas assez affinés. Mais il s'était passé quelque chose... et Leavenworth semblait également s'en être rendu compte.

- Tu le sens aussi ? lui demanda-t-il, toujours en anglais, soudain prêt au combat.

De nos jours, on ne savait jamais quand on allait être attaqué, ni par qui.

Dana attendit encore quelques instants au cas où quelqu’un ait eu des questions, mais c’étaient tous des professionnels, et ils se répartissaient dans leurs équipes respectives avec calme et efficacité. Elle résista à la tentation de soupirer, ne voulant pas montrer sa lassitude en public, et empoigna sa besace dont elle vérifia le contenu : couteau, pieux, pistolet tranquillisant, ordinateur de poche, matériel de surveillance, trousse de premiers soins, la base pour faire face à la plupart des situations, à ceci près que son sac à elle ne contenait aucun parchemin ni abrégé de magie, qu’elle était incapable d’utiliser.

Elle allait prendre la clé d’un des véhicules de patrouille quand elle remarqua un détail qui sortait vraiment de l’ordinaire. Lucas semblait inquiet. Oui, lui, le prince du flegme et des sourires narquois, le spécialiste des remarques grinçantes même en pleine action, il semblait perturbé. Owen aussi d’ailleurs, mais elle le connaissait moins, et cela pouvait être attribué à sa nervosité d’avoir été affecté pour la première fois à une mission de terrain.

Elle jeta un regard à Emilie et Philippe, leur demandant d’un signe de tête de la suivre, et rejoignit les deux jeunes hommes en quelques enjambées.

« Un problème ? »

Seul Bolton semblait avoir perçu quelque chose. Owen lui répondit d'un hochement de tête nerveux, avant de faire mine de chercher autour de lui la cause du phénomène. L'homme semblait tendu, et il valait mieux pour le moment détourner les soupçons.

Peine perdue sans doute, Dana venait de les rejoindre, alertée probablement par leur changement d'attitude. Face à son interrogation, il se tourna vers son aîné, lui laissant tout loisir de répondre.

Emilie grimaça, André ne s'était pas opposé à son affectation. Elle se demanda si être aux ordres de Dana allait être aussi fun que prévu.
Elle fouilla dans son sac à la recherche de son mobile pour avertir sa voisine de s'occuper de Radja et faillit rater le signe de tête du major qui se dirigeait vers les deux jeunes hommes. Ils semblaient inquiets, elle ne ressentait que l'excitation du combat à venir, elle ne put s'empêcher de prendre son pieu et de le ré-équilibrer dans sa main, prêt à servir.

Veronica hâtait le pas dans le dédale de couloirs du QG. Elle ne connaissait pas encore bien les lieux, mais il suffisait de suivre le flot principal des divers agents qui la mènerait sûrement au coeur des opérations en cours.
Elle savait à quoi s'attendre, et les coups d'oeil furtifs mais étonnés voire suspicieux de ceux qu'elle croisait ne la surprenait pas. Une nouvelle tête se remarque toujours, surtout quand cette tête et le corps y attaché marchaient avec assurance et détermination. Cela n'empêchait pas Veronica de sentir son coeur battre un peu plus fort : elle anticipait les réactions que ne manquerait pas de susciter son parachutage au sein des troupes, savait qu'il lui faudrait composer avec des caractères et des egos bien trempés, mais à part une légère note de stress, elle n'était pas inquiète outre mesure. Après tout, elle avait une mission à remplir, et était bien décidée à la mener à bien.
C'est à ce moment là qu'elle déboula dans la grande salle où était rassemblé le gros des troupes.
Elle repéra immédiatement Dana dont elle connaissait la fiche par coeur, et tâcha d'identifier les autres.
Elle ne dit rien pour l'instant, s'adossant au mur près de la porte, attentive.

La pièce achevait de se vider, tellement de monde était de sortie ce soir que le QG avait presque un air abandonné. Dana regarda successivement les différents membres de son équipe, avant de revenir sur Owen. Elle détestait ces histoires de pressentiments, de signaux magiques, notamment parce qu’elle y était si immunisée que même en le voulant elle était incapable de les percevoir, et devait donc s’en remettre aux impressions de tiers. Si au moins Fan’ avait été là, elle se serait fiée à son avis, mais en son absence il faudra faire sans. Du coin de l’œil, elle remarqua la présence près de la porte de la nouvelle agent parachutée de haut par la hiérarchie. On l’avait prévenue de la présence d’une observatrice, sans entrer dans les détails, et Dana avait instinctivement tendance à se méfier. Et puis, il fallait dire, quelle nuit pour entamer sa mission, elle ne pouvait pas mieux tomber ! Elle se demanda ce que la jeune femme savait sur elle. Sans doute le minimum officiel de l’armée française et de ses homologues anglais, probablement son dossier des Watchers, est-ce que ça allait au-delà ? Sans doute pas, il fallait se méfier. Mais chaque chose en son temps. Elle se rapprocha d’Owen.

« Vous pensez que c’est une menace ? J’ai besoin de savoir, je ne peux pas retarder ou compromettre l’opération de ce soir pour un courant d’air ou une excuse pour rester au QG… »

Son ton n’était pas agressif, au contraire, il se voulait compréhensif. Le jeune homme avait un bon dossier, elle lui comptait bien lui donner sa chance, mais ne pouvait pas non plus trop risquer sur un simple ressenti, qui pouvait n’être qu’une expression de sa nervosité. Si Lucas voulait bien réagir, aussi, ça les départagerai, elle le savait très sensibles aux différentes formes de magie.

Soudain toutes les portes, les fenêtres, les volets, même les stores entre les bureaux vitrés, se fermèrent violemment, en même temps que s’éteignaient toutes les lumières, jusqu’aux signaux de sortie de secours.

Instinctivement, Owen recula jusqu'à se retrouver adossé au mur.
"Oh, shit. Ca, ça vient pas de moi!" Il se mordit les lèvres, mais trop tard pour retenir ces paroles malheureuses.
Le noir était total, et il pouvait sentir dans sa poitrine les battements affolés de son coeur. Il n'arrivait pas à percevoir la présence des autres, leurs souffles étaient masqué par le sang qui tambourinait dans ses tempes.
Il fallait qu'il mette la main sur une arme. Un flingue, un pieu, qu'importe. Accroupi, il tâtonna rapidement autour de lui, sans résultat. Owen plongea alors la main dans sa poche, en sortit son téléphone portable. "c", puis "Yes". L'appareil sorti de sa veille émit alors une faible lueur, qu'il braqua alentours en guise de lampe de poche.

- Cute, fit Lucas au sujet à la fois du portable et de la confession involontaire de Leavenworth.

Un Zippo, c'était moins mignon, mais ça fonctionnait tout aussi bien. Heureusement, celui de Lucas n'était pas en manque d'essence.

- Et vivent les défenses magiques du QG, ajouta-t-il, toujours en anglais. Ses belles résolutions de parler français pour Philippe et tout autre non-anglophone présent étaient oubliées. Soit nos sorciers ont déconné, soit on est infiltrés. Quelqu'un est dans le bâtiment.

Quelqu'un, ou quelques uns. Il avait sorti un pieu de la poche intérieure de son blouson.

- N'hésite pas à te blottir contre moi si tu veux, ajouta-t-il à l'intention de Dana.

Plaisanter dans une situation pareille, ça lui venait tout naturellement. Bien sûr, il y avait une part de vrai là-dedans : il l'accueillerait volontiers contre lui. Mais la plaisanterie, c'était qu'elle devait sans doute voir dans le noir, et qu'elle était on ne peut plus badass, de surcroît. Elle serait bien la dernière à avoir peur de l'obscurité.

Veronica se demanda pendant un instant si cette obscurité soudaine faisait partie d'un exercice quelconque, mais la tension qui régnait dans la pièce ne laissait aucun doute. Ce n'était pas prévu. Et ça avait l'air bad... Ou bien le mot approprié était-il Evil ?
Elle se félicita d'être restée adossée au mur, près de la porte. Au moins elle ne se retrouvait seule pas en plein milieu de la pièce à tâtonner et être frôlée par on ne sait qui - ou on ne sait quoi.
Bien sûr, on l'avait longuement briefée. Evidemment, elle avait été mise au courant. Encore heureux, elle avait déjà assisté ou pris part à un certain nombre de "phénomènes" (aucun autre mot ne lui vint à l'esprit) dont elle n'aurait pas soupçonné l'existence quelques mois auparavant. Il n'empêche qu'elle aurait mieux aimé commencer sa mission à Paris en douceur.
Mais savoir s'adapter à toute situation n'était pas la moindre de ses qualités, et c'était en partie pour cela qu'elle avait été choisie. Veronica porta la main à son holster pour vérifier que son arme était bien en place, et attendit.

Les lueurs combinées du briquet et du portable dessinaient seulement les silhouettes de leur petit groupe. Emilie essaya de se souvenir combien de personnes avaient été enfermées dans la pièce, elle se souvenait seulement de l'emplacement des portes de sortie, ce qui avait peu de valeur pour l'instant.

- J'ai une lampe torche dans mon bardas, c'est un équipement standard pour les slayers d'après mon watcher avec les pieux annonça t-elle en anglais en fouillant dans son sac, elle tâta un instant et trouva l'objet désiré. Combien de temps avant que les générateurs prennent le relais ? demanda t'-elle en éclairant Dana. Elle regretta un instant ne pas avoir prêté plus attention à l'explication d'André sur le fonctionnement du QG.

Lorsque les lumières s’éteignirent, Dana resta parfaitement immobile, tout au plus ses poings se crispèrent tandis que, tous les sens en alerte, elle attendait la catastrophe qui ne manquerait pas de suivre. Mais quelques secondes passèrent sans que le monde s’écroule, et sa respiration reprit. Une faible lumière de portable apparu bientôt dans le noir absolu, suivie d’une flammèche vacillante de briquet.

« Yeah, you wish… » répondit-elle à Lucas. Le pire c’est qu’en effet, elle n’aurait pas fondamentalement été contre cette idée, mais cela devrait attendre.

Elle secoua la tête pour faire retomber ses cheveux devant son visage et ferma un instant les yeux, en inspirant profondément. Quand elle les rouvrit, en se tournant préventivement vers le fond de la pièce, ils luisaient très légèrement d’un éclat pourpre. Le QG n’était plus si sombre, vu vomme ça, elle distinguait les murs, les objets - rien n’avait bougé. En se concentrant, elle perçu les battements de cœur de ses collègues, plus ou moins rapides en fonction de leur degré de self-contrôle. Mais tout le reste était parfaitement silencieux, pour autant qu’elle puisse en juger. Beaucoup trop silencieux. Que tous les ordinateurs et machines soient éteintes, ce n’était pas surprenant, mais il devait rester des gens tout de même, la standardiste, l’infirmerie se préparant à toute éventualité à l’étage inférieur, des archivistes de garde… Et même au-delà, plus aucun son ne venait de la rue, pas un klaxon, pas un moteur. Etouffée par les murs et les bruits quotidiens en temps normal, la rumeur de la ville devrait lui parvenir dans ces circonstances.

Dana ne fit pas attention aux premières paroles de la Slayer, concentrée qu’elle était sur l’absence de sons, et elle venait de se retourner vers Emilie quand le faisceau concentré de la torche l’éclaira en plein visage. Elle leva aussitôt un bras et ferma les yeux, espérant qu’ils n’avaient pas eu le temps de remarquer ses pupilles étranges avant qu’elles reprennent forme et couleur humaines.

« Ce n’est pas un exercice, » annonça-t-elle d’emblée pour éviter tout malentendu, « j’en aurais été informée. Le générateur est de dernière génération, c’est un modèle de datacenter, il aurait dû entrer en fonction immédiatement. Et de toutes façons, même les panneaux d’urgence sont éteints alors qu’ils sont sur un circuit à part. Quand aux défenses magiques… » Elle eut un geste vague. Quelle que soit la nature de l’attaque, visiblement, cela ne l’avait pas arrêtée, donc inutile de s’y pencher. « Où est Philippe, il n’était pas avec nous à l’instant ? »


[HRP]Pour ceux qui essaieraient, les portables ne captent aucun réseau. Par contre, les gens sensibles à la magie perçoivent une présence à la fois diffuse et oppressante.[/HRP]

Quelques silhouettes se découpaient dans la lumière de la lampe torche. Dana, aux aguets, Lucas, l'air beaucoup plus décontracté, une jeune fille près de la porte dont les cheveux blonds accrochaient la lumière, la Tueuse -comment avait-elle dit s'appeler déjà? Emilie?- dissimulée derrière l'éclat presque aveuglant de sa lampe...
Owen laissa son portable désormais inutile retourner à sa veille, non sans remarquer un détail curieux, et murmura dans un souffle:
"Plus de réseau..."

Les paroles de Dana étaient alarmantes, mais il ne semblait pas y avoir de danger immédiat. Il ferma les yeux, faisant le vide, tentant de retrouver un rythme cardiaque plus serein.
Quelque chose n'allait pas.
Il n'arrivait pas à préciser cette impression, à la verbaliser.
Quelque chose n'allait pas du tout.
Une sorte de vide immense, de sensation de manque terrible.
"It's not there anymore"
Les mots n'avaient pas de sens, et pourtant ils sonnaient juste.
"C'est plus là... C'est plus là..."

- Philippe, c'est pas drôle, fit Lucas en français, pour la première fois ce soir, ignorant le charabia que sortait Leavenworth.

Son accent n'était pas mauvais, mais il ne serait jamais passé pour un francophone. Devant le silence qui lui répondit, il commença à vraiment se demander what the bloody hell was going on, tout du moins avec nettement plus d'urgence qu'avant. Il n'était pas aussi doué que d'autres en perception magique, mais il pouvait au moins essayer.

- Wow... It's not small, and it's not something I can track down. Just this huge menacing presence. Il sourit à Dana. Fun times. Puis il tourna son attention vers Leavenworth. De quoi tu parles, mec ?

Owen fixa un moment Lucas, sans vraiment le voir. Il voulu lui dire que "ça" avait disparu, mais se ravisa au dernier moment et ferma la bouche. L'autre l'avait déjà entendu. Et Lucas voulait comprendre.

Qu'est-ce qui avait disparu?

Il se concentra à nouveau sur la sensation terrifiante. Il eut un instant de vertige, une vision de lui-même, un Owen microscopique flottant au milieu d'un vide infini.
C'était ça. Il venait de déceler une piste. La vision n'était pas nouvelle, il se souvenait maintenant l'avoir eu maintes fois. Mais il y avait toujours une masse gigantesque aux couleurs de la Terre sous son microscopique-soi, un patchwork d'orangés et de gris, de magma bouillonnants et courants glacés, baignés d'une lumière solaire qui en chauffait l'enveloppe protectrice, sous le froid regard des étoiles. Et puis la vision se rapprochait à une vitesse vertigineuse jusqu'à zoomer en gros plan sur un Owen les pieds solidement plantés au sol, connecté au monde qui l'entourait.

Il n'y arrivait plus. Il ne voyait que le vide qui l'entourait, l'absence de toutes chose.

Il chercha le regard de Lucas, y planta le sien pour se raccrocher à quelque chose, si petit soit-il.

"J'ai l'impression que..."
Il déglutit difficilement.
"Je crois que le monde a disparu."


[HRP]Frédéric, ça colle avec ton truc?

En voyant le mouvement de recul de Dana, Emilie abaissa sa torche vers le sol. "Désolée murmura t-elle. Elle balaya la pièce, la lumière accrocha la silhouette d'une jeune femme blonde adossée au mur, elle leva la main dans un geste de salut. A part eux, personne dans la pièce.
Le silence devenait oppressant, elle sentit ses sens se mettre en alerte , prête à bondir à la moindre attaque.

C'est à ce moment que le jeune anglo-saxon fit ce qui ressemblait à une crise de nerf. Qu' est-ce qu'il voulait dire par le monde a disparu ? En un instant, elle eut l'image terrifiante de la pièce dérivant dans le vide, telle une immense boite de Schrödinger. Surtout ne paniquer, elle maudit son imagination parfois trop fertile.

- Tu veux dire que tu as perdu le contact avec notre monde ? qu'on a été transporté dans une autre dimension ?

Owen lança un regard désespéré à Emilie. Comment lui expliquer ce qu'il ne comprenait pas? Il se pressa les paumes contre les tempes.
"Je ne sais pas. I can't explain. Je ne sais pas comment et pourquoi je sens ça. Mais c'est tellement vide autour de nous. Tellement vide."
Il secoua la tête pour tenter de chasser cette sensation de solitude immense qui le saisissait chaque fois qu'il essayait de se représenter le monde extérieur.
Sans succès.

Dana fit une grimace en entendant Owen décrire magiquement ce qu’elle ressentait physiquement – ou plutôt qu’elle ne ressentait pas, c’était bien le problème. Après la vue et l’ouïe, elle aurait bien tenté un test olfactif, mais risquait de trop changer de physionomie en éveillant ce sens plus profond. Ce n’était vraiment pas le moment de faire paniquer les autres, ils restaient dans l’ensemble remarquablement calmes et professionnels, et cela valait mieux.

Pendant que Lucas se dirigeait vers la sortie principale, elle ouvrit simplement la porte donnant sur le bureau voisin, et resta interdite devant l’absence de vue. L’ouverture donnait sur un carré d’un noir absolu, total. Pas un son, pas un courant d’air, pas une lumière, et le faisceau de la torche qu’Emilie braquait alternativement vers elle cessait brusquement à hauteur de l’encadrement comme un mauvais photomontage. Immunisée à la magie ordinaire ou pas, la jeune femme n’avait guère envie d’y plonger d’y main, pas tant qu’il restait d’autres pistes à explorer. Même l’expérience de lancer un objet vers ce néant étrange ne la tentait pas, comme si cela pouvait perturber un processus cosmique, déranger une créature capricieuse… ou simplement disparaître comme dans un trou noir, sans bruit et sans écho, rajoutant une couche à la claustrophobie qui menaçait déjà d’éclater en elle. Elle referma la porte doucement, sans pouvoir réprimer totalement un léger tremblement de la main en relâchant la poignée.

En attendant de voir ce que Lucas allait trouver de l’autre côté, elle se retourna brusquement et bondit presque vers la jolie blonde qui n’avait pas bougé, sur le mur en face. Son poing fusa, mais au lieu de frapper, elle plaqua la main à plat sur le mur à côté, sans la toucher.

« Miss Mars ? Y a-t-il quelque chose dont vous souhaiteriez nous parler ? Comme Lucas l’a rappelé, les protections magiques du QG sont parmi ce qui se fait de mieux, elles ne se pénètrent pas sans une action de l’intérieur. Je trouve bien étrange que ce… phénomène coïncide avec votre arrivée. C’est un piège ? Un test ? »


[HRP]Pour Lucas : la porte ouvre sur le hall habituel, où tout est fermé et silencieux, mais rien d’anormal en apparence. Parmi les autres portes, je précise qu’il y a les toilettes. La suite selon ce que tu fais. La magie ou vos éventuels pouvoirs respectifs fonctionnent normalement, mais sans RIEN qui vienne de l’extérieur.[/HRP]

Veronica sursauta lorsque la main de Dana s'abattit contre le mur à quelques centimètres de son visage.
« Miss Mars ? Y a-t-il quelque chose dont vous souhaiteriez nous parler ? Comme Lucas l’a rappelé, les protections magiques du QG sont parmi ce qui se fait de mieux, elles ne se pénètrent pas sans une action de l’intérieur. Je trouve bien étrange que ce… phénomène coïncide avec votre arrivée. C’est un piège ? Un test ? »
Veronica sourit. Bon, de ce qu'elle entendait depuis quelques minutes, et si elle se fiait au discours de Dana, ils étaient tous aussi déroutés qu'elle. Mais elle se sentait étrangement calme. Peut-être parce que ce monde magique, d'ombre et de lumière, lui était encore peu familier. Elle ne croyait pas une seconde que le monde pouvait avoir "disparu" comme le laissait entendre le jeune homme qui, après une brève incursion dans le couloir, était revenu dans la pièce.
Elle planta ses yeux dans ceux de Dana et soutint son regard, approchant même son visage de celui de la jeune femme, dans une attitude laissant clairement comprendre qu'elle ne comptait pas se laisser intimider.
"C'est une excellente question, mais si c'est une sorte de test, je n'en ai pas été informée. Aussi au lieu de nous chercher des poux, ajouta-t-elle en tirant son arme de son holster et en l'armant d'un claquement sec, je vous propose d'aller voir de quoi il retourne."
Sur ce, d'un geste décidé, elle ouvrit la porte et fit un pas dans le couloir.

Dana laissa passer Veronica sans s’y opposer, bien consciente que la charmante jeune femme était tout autant qu’eux victime du phénomène. Elle posa un regard méprisant sur le révolver ; elle-même ne portait jamais son arme de service et elle n’était jamais à l’aise avec les militaires patrouillant avec leurs fusils d’assaut. D’un autre côté, avoir un échantillon de chaque style d’arme pourrait avoir son utilité, si l’artillerie des Watchers était inaccessible. Après un dernier regard à la salle où ils se trouvaient, et non sans un frisson en passant devant la porte qu’elle avait essayé d’ouvrir sur le néant absolu, elle avança à son tour dans le couloir. Au passage, elle décrocha un poste d’appel interne, mais comme elle s’y attendait, il n’y avait aucune tonalité.

Elle fit quelques pas prudents en direction du hall, les mains tendues devant elle, les sens aux aguets. Ses pupilles étaient à nouveau sauriennes et couleur de feu, ses collègues ne le verraient pas de derrière, et tant pis si sa nyctalopie les étonnait, il y avait bien plus grave à se soucier dans l’immédiat. Elle s’immobilisa brusquement à l’entrée du hall d’accueil, laissant les autres la rejoindre s’ils le souhaitaient. La pièce commençait normalement, avec son dallage, des canapés dans un coin pour faire patienter les visiteurs, quelques plantes vertes… mais à peu près en son milieu, tranchant l’axe du bureau de la réceptionniste et divisant l’espace en deux, une frontière nette et impossible se dressait, mur d’ombre absolu, absorbant indifféremment son, lumière et air. La limite était légèrement courbe, comme si la zone qu’elle englobait était ronde ou sphérique. Certains meubles étaient en partie pris dans le néant, mais le côté restant visible était aussi ordinaire que d’habitude.

Sans se retourner, Dana écouta les diverses exclamations à mesures que les autres la rejoignaient et éclairaient la pièce à la flamme ou à la lampe.
« Euh… quelqu’un a une suggestion ? » fit-elle d’un ton presque plaintif qu’elle détesta aussitôt, mais qu’il était trop tard pour reprendre. Certes elle était censée toujours savoir quoi faire etc., et si ce n’était pas le cas, il ne fallait pas le montrer à ses subalternes. Mais là, franchement, elle n’avait pas besoin de ça.

Veronica avançait d'un pas plus assuré qu'elle ne l'était vraiment. Le jeune prénommé Lucas lui emboita le pas en faisant une remarque sur son flingue, remarque qu'elle ignora superbement. Bien sûr que son arme était inutile contre la plupart des phénomènes qu'ils subissaient chaque jour, mais le poids du métal qui se réchauffait doucement dans sa paume la rassurait un peu.
Quand Lucas se mit à son niveau pour éclairer devant eux et lui demanda si elle était nouvelle, elle lui décocha un regard et un bref sourire en guise de remerciement, tout en murmurant "kinda..." du bout des lèvres.
Lorsqu'ils arrivèrent au niveau du hall, Veronica ralentit et laissa Dana la dépasser. What the fuck ?
Une partie de son cerveau sourit intérieurement à la note un peu angoissée qu'avait pris la remarque de celle-ci (now who's the smart ass uh ?), mais le reste de sa conscience restait interdite devant le spectacle qui s'offrait à eux.
Okay, se dit-elle, je crois que c'est le moment de laisser les spécialistes prendre les devants.
Elle grimaça quand Lucas s'approcha du mur de néant, mais fut soulagée quand elle comprit ce qu'il allait faire.
Smart one.

La table basse que Lucas tira vint sans résistance, grinçant sur les dalles avec une normalité presque incongrue. Tous se rapprochèrent et les rares sources de lumière furent braquées sur le petit meuble. A partir de l’endroit exact qui avait été plongé dans le néant, le beau bois vernis devenait terne et vermoulu, il était noirci par endroit et les pieds rendus branlants par l’humidité. C’était comme si la deuxième moitié avait passé quelques décennies exposée aux intempéries.

Soudain il y eu un profond grondement, le sol se mit à trembler, et la zone d’ombre absolu sembla couler à l’endroit où la table avait été extraite, comme un liquide impalpable suintant d’une fissure. Le grondement cessa et, d’un coup, c’est le mur obscur tout entier qui avança, lentement mais avec une froide détermination, comme s’il se resserrait autour de la bulle de normalité préservée. En quelques instants, le bureau de la réception fut absorbé, puis les plantes en pot, et le salon d’attente commença à disparaître à son tour.

Dana recula d’un pas en fixant la progression du vide vers eux.
« Smart move, Lucas, bien joué. Bon, il fallait bien essayer quelque chose, tu n’y es pour rien. ».

Un nouveau pas en arrière, pendant lequel elle eu le réflexe de fermer les yeux pour essayer de retrouver des pupilles humaines, mais ce n’était pas évident avec le début de panique qui s’emparait d’elle, et elle n’était pas trop sûre du résultat. Elle qui n’aimait déjà pas rester en intérieur ou enfermée dans une voiture, elle n’était pas franchement à l’aise avec un univers en peau de chagrin qui se refermait inexorablement.

Veronica recula avec les autres quand le mur de néant commença à avancer. Elle repensa à ce film qu'elle avait vu enfant, L'Histoire Sans Fin, où le néant absorbait inexorablement le monde de Fantasia, et se demandait s'il y avait quelque part à l'extérieur un Bastien prêt à leur venir en aide.
« Smart move, Lucas, bien joué. Bon, il fallait bien essayer quelque chose, tu n’y es pour rien. ». dit Dana, et Veronica ressentit que l'écho de sa voix avait diminué avec la taille de la pièce.
Elle se tourna vers Luca quand il répondit à Dana. Décidément, Veronica aimait bien Lucas. Il savait prendre des initiatives, et ne se laissait pas impressionner par la belle brune. Elle lança un regard amical au jeune homme, l'invitant muettement à faire équipe avec elle si le coeur lui en disait.

Les autres étaient partis depuis un moment déjà, et le silence devenait pesant. La salle désormais presque vide, plongée dans l'obscurité, prenait un caractère angoissant. Avec un regard d'excuse vers Emilie, qu'elle n'apercu probablement pas, Owen se leva et se dirigea rapidement vers le couloir d'où provenait une faible lueur et des échos de voix étouffées.
Il réussit a atteindre son objectif sans heurter quoi que ce soit, mais en fin de compte, il décida qu'un petit retard n'aurait pas fait de mal.
Woa... C'est quoi ce truc?

L'obscurité ne l'avait jamais effrayée, dans le noir, on pouvait se cacher, on avait une chance d'échapper à ses poursuivants. Mais le noir qu'avait dévoilé la porte ouverte n'avait rien à voir avec la nuit ou les pénombres. Elle laissa partir Owen sans un mot, tandis que le faisceau de sa lampe éclairait le mobilier. Il nous faut des lampes. Elle tenta d'ouvrir le placard le plus proche d'elle mais il ne contenait rien d'intéressant, elle dut forcer le suivant fermé à clé, deux sacs à dos étaient posés à terre, elle trouva enfin ce qu'elle cherchait dans le premier, elle vérifia l'état de lampe, elle fonctionnait. Elle prit le second sac quand elle sentit une résistance, en tirant elle sentit le tissu lacher et le contenu se répandit par terre. Elle ne put s'empêcher de jurer entre ses dents, elle éclaira le fond du placard, comme pour la porte le faisceau fut coupé par le noir, sauf que là il ne s'était pas arrété au mur, il semblait avoir grignoté une partie du placard. C'est pas bon, vraiment pas bon, elle regardait les armes étalées mais elle éprouvait une certaine répugnance à les toucher alors qu'elles avaient été si proches, voire en contact avec le noir.
OK il était temps de retrouver les autres.

Tous ceux avec des compétences magiques, on fouille ce qu'il nous reste d'espace vital et on essaie de trouver le moindre indice. Les autres aussi d'ailleurs, ajouta-t-il. Par équipes de deux, un magicien un non. Allez, vite.
Lucas semblait avoir pris les choses en main, elle lui tendit l'autre lampe : Cela pourra être utile

Dana recula en vacillant légèrement, elle se retint au chambranle de la porte en portant brièvement une main à son front, puis se redressa. Elle se sentait mal, et cela allait bien au-delà de sa petite forme de ces jours-ci ou de l’inquiétude liée à la situation. Ces dernières années avaient été trop chargées en aventures étranges et expériences diverses – entre rencontres avec des fées, voyages dans le temps, combats contre des démons variés, et presque pire, rendez-vous d’affaires dans les locaux immaculés de Wolfram & Hart – pour que cela suffise à la perturber à ce point. Quoi alors ? Elle releva soudain la tête, venant de se souvenir de ce que cette sensation d'écartèlement interne lui rappelait.

Lucas s’éloignait déjà avec la petite blonde, et si Dana lui était reconnaissante de prendre les choses en main, elle devait admettre à contrecœur une pointe de jalousie qui avait le don de l’énerver. Elle se tourna vers Owen et Emilie.
« Voyez ce que vous trouvez, et soyez prudents, restez à portée de voix. Owen, pour une première mission, vous auriez pu mieux tomber… je suis désolée. »

Elle se hâta de rejoindre Lucas et Veronica qui fouillaient le bureau suivant, dont le mur du fond venait de disparaître sous l’avancée du néant. Une fois encore, tant pis pour la discrétion ou les questions qu’elle pourrait soulever chez l’observatrice.

« Lucas, tu te souviens de la mission il y a quelques mois, avec les jeunes qui accélérait localement le temps pour cambrioler tranquillement des endroits surveillés ? Quand on les a retrouvés, et que j’ai été prise entre leur magie et le monde normal… et bien là c’est un peu ça. Moins violent, plus progressif peut-être, mais c’est comme si… comme si le monde avait changé brutalement, et que nous étions protégés par les barrières du QG. Mais elles lâchent, visiblement. La dernière fois, ça ne m’avait guère réussi… S’il m’arrive quelque chose, tu es en charge. »


[HRP]Pour les magiciens : à mesure que la sphère qui nous entoure se resserre, vous avez l’impression que la magie se concentre autour de nous, un peu le principe de l’air comprimé appliqué à la magie, si vous voyez ce que je veux dire. Pour tout le monde, les recherches donnent quelques armes, pas mal d’appareils électroniques divers et souvent hors services, des bouquins anciens… un peu ce que vous voulez, on est quand même au QG des Watchers. A ce stade, on dispose d’une zone explorable d’une dizaine de pièces de large, en régression constante.[/HRP]

Owen regarda Dana s'éloigner, avant de jeter un coup d'oeil perplexe à Emilie.
"Par équipes de deux, un magicien un non"
Les paroles de Dana résonnaient encore à ses oreilles. Un magicien, un non. Mais Emilie était pourtant une slayeuse, elle n'avait rien d'une... d'une... Si elle n'était pas magicienne, qui l'était? Il y eu comme un déclic, l'impression que tout prenait enfin sa place. Les accidents bizarres qui avaient émaillés son enfance et son adolescence, les événements de l'heure précédente... Il était magicien.
Ou pas.
Tout cela n'avait rien à voir avec ce qu'il avait lu dans les manuels glanés ici et là. De toute façon, il n'avait aucune idée de ce qu'il pouvait faire ou de comment s'y prendre. Ni aucun contrôle sur quoi que ce soit. Les autres s'étaient regroupés entre pros déjà expérimentés, en laissant ensemble la slayer débutante et un apprenti-magicien qui ne savait rien faire des ses dix doigts (virtuels, parce que les doigts ne devaient pas servir à grand chose dans l'affaire?) et qui aurait été bien incapable de même faire... faire... Il échoua à nommer le plus simple et basique des sorts. Il ignorait même cela.
"Nice."
Il sentait la colère et la rage monter, et se demanda si c'était un antidote acceptable à la peur qui lui tordait le ventre. Sans doute pas. Ils allaient devoir travailler en équipe, tous. Il devait se focaliser sur autre chose.
Peut-être ce sentiment d'oppression qui se faisait de plus en plus fort?
Ou cette impression de légèreté qu'il ressentait depuis qu'il avait eu cette impression de vide autour d'eux?
Non, peut-être pas non plus.
Il lança à la jeune fille un sourire qui tenait probablement plus d'une grimace.
"Bon, on va fouiller un peu à côté, dans une pièce avec quatre murs en état de marche, avant que mon dîner ne se fasse la malle?"

Une fois Dana resortie du bureau, Veronica demanda à Lucas :
- Ca fait longtemps que vous bossez ensemble ?

Ok va pour l'exploration mais je crois qu'on devrait plutôt voir jusqu'où cette chose s'étend ou si un matériau ou n'importe quoi a pu stopper ou ralentir sa progression. Emilie suivit le jeune anglais en essayant d'éclairer sa route. En d'autres circonstances, cela aurait pu être intéressant d'avoir le droit de fouiller le QG, d'ouvrir les portes interdites..., alors comme ça tu es sorcier ?

- Quelques mois, répondit-il en ouvrant quelques tiroirs, récupérant ce qui pouvait servir. Tu nous débarques d'où ? A part des States.

Parce que ça, c'était évident avec cet accent. Et vu l'emportement de Dana quelques minutes plus tôt, aucun doute pour lui, Miss Mars n'était pas une simple recrue. Elle avait cependant tout sauf l'air d'une militaire, même si elle savait visiblement manier un flingue.

Rien, rien, rien, rien, rien. Il n'était pas claustrophobe, mais s'il s'écoutait il serait presque angoissé, là, quand même. La magie s'intensifiait, visiblement plus dense à mesure que l'espace se réduisait, et ça ne lui disait rien qui vaille. Comme cette affaire de vol ? Si ce n'était qu'un sort, il devrait pouvoir en trouver la cause.

Ce ne fut pas sur le néant qu'il concentra ses sens magiques. Mais puisqu'une exploration de base semblait ne rien révéler, un scan magique de l'espace existant devrait bien donner quelque chose. Avec toute cette magie si concentrée, impossible de croire qu'il ne pourrait rien trouver.

"Hmmm. Jusqu'à y a 5 minutes j'aurais dis non. Et je doute avoir les qualifications requises pour le job."

Il passa la tête prudemment dans l'encadrement d'une porte, laissant Emilie éclairer la pièce avant d'oser y pénétrer. Il ne tenait pas à se cogner dans le voile noir. Pas grand chose ne distinguait ce bureau d'un autre, en dehors de ce qui gangrenait déjà le mur du fond.
En voyant le tas de paperasses qui traînait là, il se demanda comment la chose se comportait face au feu. Est-ce qu'elle le grignoterait aussi?

Il contempla la paume de ses mains, comme s'il pouvait y déchiffrer la clé de ce qui arrivait. Presque par jeu, il s'imagina y créer une boule de feu. Il l'imaginait déjà, une balle de flammes crépitantes, illuminant la pièce, impatientes d'être livrées à elles même. Ses mains demeurèrent vide, et il ne put s'empêcher de sentir une pointe de déception.
Peut-être qu'en s'y prenant de manière plus classique? Il visualisa à nouveau une boule de feu, concentré de pouvoir destructeur, qu'il projetait au loin avec vigueur, en mimant le geste.
Toujours rien. Enfin, toujours pas de feu. Il fixa quelques secondes les feuilles de papiers qui, soulevées par un courant d'air improbable, étaient allées se plaquer au mur.
"Well... Okay, c'est pas encore très au point, en fait. T'aurais pas un briquet?"
Il était quasi sûr d'avoir senti le sol trembler en même temps. Prudemment, il décida d'oublier de signaler ce détail.

L'oppression s'était atténuée après sa petite expérience, mais elle revenait déjà, accompagnée de vagues de fourmillements dans les doigts.
"Y a un truc bizarre. En plus du reste, je veux dire."
Lucas saurait peut-être. Ou Dana.
Est-ce que les insectes ressentaient ce genre de chose avant un orage?

- Quelques mois, répondit-il en ouvrant quelques tiroirs, récupérant ce qui pouvait servir. Tu nous débarques d'où ? A part des States.
- Well..., répondit Veronica tout en ouvrant elle aussi les portes des placards présents dans la pièce. Pieux, eau bénite, shurikens, et même quelques gousses d'ail, mais pas l'ombre d'un revolver ou de munitions supplémentaires à ajouter à son flingue...:sigh: tu veux dire de quelle ville, ou de quelle agence ? Ajouta-t-elle en se tournant vers Lucas, pas dupe du sens de sa question.
Elle espérait qu'au vu des circonstances, il n'allait pas, comme Dana, se conduire comme un môme et faire de la newbie une "méchante". Cmon guys, grow up, pensa-t-elle.
Elle se sentit un peu bête de réagir ainsi, mais les circonstances pour le moins inhabituelles ajoutaient au stress d'une nouvelle mission. Et puis, tout au fond d'elle, elle avait un peu peur d'être mise à l'écart : comment faire face à tout ce surnaturel quand on n'avait aucun pouvoir... ?
Sans attendre la réponse de Lucas, elle enchaîna :
- So... what do you think this is all about uh ?

[HRP]Moi j'aurais bien voulu quelques minutes de plus avant les événements de Dana, histoire d'allumer ce feu. Pas tant pour vraiment voir ce qu'il fait sur le bidule-truc noir (quoique?), mais surtout pour qu'Owen découvre qu'il peut faire autre chose que des courants d'airs. Donc je délaye un peu, au cas où Emilie aurait un briquet ou une allumette. Sinon, bah, tant pis.[/HRP]

Owen s'empara d'une liasse de feuilles, qu'il entreprit de transformer méthodiquement en boules froissées assez lâches.
Quelques hivers passés dans un manoir au fin fond du Pays de Galles, équipé principalement de cheminées, vous apprenaient rapidement qu'il valait mieux laisser respirer le papier avant de tenter de l'enflammer.

"Ou des allumettes? De quoi démarrer une petite flambée, parait que ça destresse."

Ce n'était plus des fourmillement mais des picotements au bout des doigts. Il essaya de respirer calmement, mais la tension qui gagnait peu à peu tous ses mucles continua a progresser...

"T'aurais pas un briquet ?"
Emilie se mordit les lèvres pour empécher le rire nerveux de fuser. Ainsi c'est ce qu'il tentait de faire, allumer un feu.
Elle posa la lampe sur un bureau proche d'elle, fouilla dans l'un des poches intérieures de son sac.
"Je dois avoir ça, donne-moi une minute"
Elle ne put s'empêcher de jeter un coup d'oeil à la masse sombre au fond de la pièce. Elle avait ressenti une légère vibration et essaya de jauger si celle-ci avait progressé.
Elle se tourna vers Owen en lui tendant le briquet publicitaire.
"Tu as senti ce tremblement ?" Elle essaya d'apaiser sa respiration, laissant ses sens s'ouvrir au moindre mouvement, au moindre souffle, prête à réagir à la moindre menace.

"Thanks."
Il s'empara du briquet coloré, et actionna le mécanisme à plusieurs reprise avant de réussir à obtenir une minuscule flamme.
Une question restait en suspens, cependant. Il y répondit, en jetant à Emilie un regard coupable.
"Le tremblement? Euh... je crois que c'était moi aussi, ça..."
Pour couper court à son embarras, il saisit une feuille et l'approcha de la flamme, qui lécha le papier avec gourmandise. Elle réussit enfin à s'y accrocher, mordant les fibres, bordant d'un fin liseré d'ors et de rouges le coin de la feuille qui se recourbait déjà.
Owen plaça avec précaution la feuille parmi les boulettes de papier déposées auprès de la paroi noire, en prenant soin d'en laisser une au contact des flammes naissantes, avant de reculer rapidement à bonne distance.
Il observa son oeuvre d'un oeil critique. Il s'y était pris trop rapidement, et le papier machine rechignait visiblement à céder aux douces sollicitations du feu. Plutôt que de conquérir les boules de papier et de gagner en force, les flammèches se mouraient. Il allait devoir recommencer.

Mais les flammes à l'agonie, là bas, criaient leur rage et leur frustration. Tout ce papier à portée d'étincelles, cette promesse de feu vif et fort qui s'évanouissait. Il avait l'étrange impression de les entendre s'exprimer, de ressentir leur douleur. Il se tendit vers elles, désireux de leur apporter son aide sans pour autant savoir comment.

Les boulettes s'enflammèrent simultanément, laissant monter de grandes langues de feu qui léchaient déjà le plafond.
Surpris, il fit un bond en arrière.
"Waaahhh!!!"
Les flammes étaient trop vives, trop hautes, pour le combustible qu'elles avaient à disposition. Elles ne pouvaient pas exister ainsi, et pourtant elles brûlaient avec avidité, projetant leur chaleur à travers la pièce. Quelque chose lui disait que si il cessait de s'y intéresser, elles se répandraient à travers la pièce, affamées, pressées de dévorer tout ce qu'elles pourraient atteindre. Il commençait à avoir peur. Il voulait qu'elles cessent leur supplique, qu'elles arrêtent de lui crier leur faim.
Brusquement, comme victimes d'un invisible aspirateur géant, les flammes refluèrent en un point unique, qui brilla quelques secondes avant de s'éteindre. C'était fini. Il n'y avait plus rien. Plus rien que le papier carbonisé et des taches noirâtres au sol. Pas une braise ne rougeoyait.

Et il se sentait calme. Apaisé. Épuisé.

Par pour longtemps, cependant. La pression revint, et avec elle une énergie extraordinaire, parcourant ses membres de tremblements. Il comprit enfin la source de ce phénomène. Alors que leur monde rétrécissait, grignoté par le mur noir, la magie fuyait dans l'espace restant, s'accumulant à des taux phénoménalement élevés. Et il jouait les condensateurs.
Il regarda Emilie, épouvanté. Finalement, ce n'était pas la chose noire qui le tuerait. Il allait exploser avant. A moins qu'il ne tue tout le monde avec un autre déchaînement incontrôlé de magie. Parce que là, ce n'était que le début. La chose noire avançait, et ça allait empirer...

[HRP]Bon, ben... Voilà... Corinne, si tu veux, après avoir fait réagir/parler/agir/etc Emilie, tu peux leur faire ressentir les deux grondements dont parlait Fred, si tu veux. L'avantage c'est que du coup ils seront déjà assez éloignés de la surface noire pour ne pas risquer de perdre un orteil. [/HRP]

Dana restait devant le mur de ténèbres, immobile à part le pas qu’elle faisait parfois en arrière pour ne pas se faire rattraper par son avancée. La tête baissée, elle fouillait dans sa mémoire, cherchant des cas similaires, des signes avant-coureurs qui auraient été ignorés ou mal interprétés. Dans sa main, un ordinateur portable replié ; il contenait une sauvegarde des archives récentes, qu’on ne mettait plus en livres - peut-être à tort - mais si sa coque de plastique noir commençait normale et luisante, la partie de droite était noircie, en partie fondue, les restes de la batterie gouttant au sol... elle l’avait trouvé quelques instants trop tard. En parallèle, elle restait aux aguets, attentive aux échos des conversations et des fouilles de ses collègues en arrière plan, prête à intervenir. Mais pour faire quoi ? Là était la question.

Elle ne s’attendait pas à ce qu’ils trouvent quoi que ce soit d’utile, mais on ne savait jamais, et au moins être occupé les gardait calmes et concentrés. Le manuel du parfait petit leader, se dit-elle avec une grimace. Un violent grondement parcouru soudain le bâtiment, il cessa rapidement mais dans l’intervalle, la frontière noire fit un bond en avant. Dana ne l’esquiva que de justesse avec une roulade, et elle venait à peine de se relever qu’un second tremblement se fit ressentir, lui aussi accompagné d’un brusque rétrécissement de l’espace disponible. Cette fois, le mur opaque ne s’arrêta pas et continua sa progression accélérée. Dana se retourna vers le couloir, dont l’autre extrémité disparaissait déjà dans l’ombre impénétrable. A ce rythme, il ne leur restait que quelques minutes.

Elle revint en courant vers le centre approximatif de leur espace vital en plein effondrement.
« Vous avez trouvé quelque chose ? » demanda-t-elle à mesure qu’ils la rejoignaient, son ton comme son expression ne cachant pas qu’elle n’avait guère d’espoir de ce côté.

Autour d’eux, sans qu’elle le ressente mais de façon qui devait être immanquable pour tous les autres, même les non sorciers, la magie se concentrait dangereusement. Des flashs d’octarine crépitaient par endroit, et la pression thaumaturgique accumulée faisait virer au noir les yeux de Lucas et même d’Owen. L’air lui-même devenait dense et lourd, et la température augmentait sensiblement.


[HRP]Avant de réagir, si vous le souhaitez vous avez eu le temps d’avancer dans les conversations en cours ou questions en suspens. Chargée de magie elle aussi, Emilie voit ses sens de slayer décuplés (et peut d’ailleurs avoir une curieuse sensation à propos de Dana, à discuter en privé si tu veux).[/HRP]