Arrivée à Paris - Juste une intro (Manu)

La décélération du train le réveilla en douceur. On n'y voyait goutte à travers les fenêtres douteuses de l'Eurostar, mais l'agitation des habitués laissait peu de place au doute. Paris approchait.
Grégoire se renfonça dans son siège, attendant l'arrêt du train, la fin du lent écoulement des voyageurs pressés. Il arrivait enfin au bout du voyage, dans une ville qu'il espérait plus sûre. Il descendit du train, parcourant le quai interminable jusqu'au hall de la gare encore illuminé à cette heure tardive. Il trouva son chemin jusqu'à l'esplanade devant la gare, savourant l'air frais de la nuit encore jeune.

Il réprima un soudain frisson et résista à l'envie soudaine de regarder par dessus son épaule. Ils ne pouvaient pas l'avoir suivi jusqu'ici. Après leur avoir échappé à Los Angeles, il avait pu les semer, papillonnant d'un endroit à l'autre en Amérique du Nord. Il était sûr de ne plus les avoir sur ses traces avant de traverser l'Atlantique.
Il balaya du regard le boulevard qui s'ouvrait devant la gare. C'était une ville ancienne, où on pouvait se fondre parmi les passants anonymes, au milieu des devantures éclairées et du bourdonnement sans fin des voitures, où la moindre ruelle ne cachait pas une armée de tueurs armés jusqu'aux dents. C'était une ville ancienne, qui possédait sans doute ses propres démons, mais où les créatures de la nuit suivaient des coutumes un peu moins anarchiques. C'était une ville ancienne ou les mondes se frôlaient depuis des siècles sans incidents majeurs. Un endroit civilisé.
A la réflexion, plutôt que de marcher jusqu'à sa nouvelle demeure, il allait prendre un taxi.



* * *


L'immeuble ne payait pas de mine, mais après avoir gravi les trois étages qui le séparaient de l'appartement et parlementé quelques minutes avec la serrure récalcitrante, les lieux se révélaient plus que satisfaisant. Il joua quelques instants avec les robinets et les interrupteurs, s'assurant que tout était en état de marche. Il faudrait qu'il trouve un moyen de remercier Mason, qui entre deux magouilles foireuses réussissait parfois à l'étonner. Que Mason, réfugié à Seattle, soit entré en possession des clés d'un appartement meublé et vide d'habitant à Paris tenait du miracle. Que l'immeuble soit encore debout, les murs non infestés de rats et la couche de poussière inférieure à un centimètre n'avait même plus de qualitatif.

Il s'assit dans la petite cuisine, face au frigo vide. Il avait plusieurs jours de sommeil à rattraper et une ville à explorer, mais avant toute chose, il fallait parer au plus pressé.
La faim commençait à monter.